Auteur invité

Le Dr Stephen Pistorius est chercheur scientifique principal à  CancerCare Manitoba et à l’Institut de recherche en oncologie et hématologie, directeur du programme d’études supérieures en  physique médicale, professeur de physique et d’astronomie et professeur agrégé de radiologie à l’Université du Manitoba.


Selon Breastcancer.org, 12 % des femmes dans les pays développés développeront un cancer du sein invasif à un moment donné dans leur vie.

Cela signifie qu’une femme sur huit sera touchée par le cancer du sein.

L’incidence du cancer du sein dans les pays à revenu faible ou intermédiaire (PRFI) est plus faible que dans les pays riches, mais les taux de mortalité sont plus élevés. Par exemple, le rapport de la Société américaine du cancer sur le cancer en Afrique (2011) affirme que « le taux de survie à cinq ans pour le cancer du sein est inférieure à 50 % en Gambie, en Ouganda, et en Algérie, comparativement à près de 90 % aux États-Unis ». Des disparités similaires dans la mortalité par cancer sont également observées entre les centres ruraux et urbains dans les pays développés.

La détection précoce du cancer du sein a un impact direct sur le taux de survie des femmes. Alors que la mammographie par rayons X est la norme pour l’imagerie du cancer du sein, elle comporte certaines limitations. En voici quelques-unes :

  • L’utilisation des rayons X, une forme de rayonnement ionisant, qui peut causer le cancer;
  • La nécessité de comprimer le sein, ce qui peut être inconfortable pour la femme;
  • Le coût relativement élevé, qui limite la disponibilité de la mammographie dans les pays à faible revenu;
  • Le besoin de personnel qualifié pour faire fonctionner le système et interpréter les images.

Avec le soutien de Grands Défis Canada, qui est financé par le gouvernement du Canada, notre équipe à l’Université du Manitoba évalue la faisabilité d’un système portable d’examen du sein à micro-ondes qui vise à améliorer l’accès au pré-dépistage du cancer du sein dans les pays à revenu faible ou intermédiaire et les collectivités rurales des pays développés – un exemple potentiel de rétro-innovation.

Des signaux à micro-ondes semblables à ceux émis par les téléphones mobiles commerciaux peuvent être dirigés vers un sein, où ils se dispersent quand ils interagissent avec différents types de tissus. Les tumeurs du sein dispersent davantage que les tissus normaux, et un groupe dirigé par le professeur Stephen Pistorius de l’Université du Manitoba se sert de ces propriétés physiques pour mettre au point d’autres méthodes de détection de la présence d’une tumeur dans le sein.

 Figure 1: A schematic of an early version of the system illustrating the main components.

Figure 1: A schematic of an early version of the system illustrating the main components.

Un système peu coûteux, de la taille d’une valise, a été conçu et bâti en utilisant des technologies similaires à celles de la téléphonie mobile (figure 1). Celles-ci comprennent l’instrumentation à radiofréquence (sans fil), des antennes compactes et des capteurs à semi-conducteurs  de conception spéciale. La technologie des systèmes intégrés est utilisée afin de fournir la puissance de calcul nécessaire pour la collecte de données, le classement des résultats et la gestion de l’interface avec la cliente d’une manière détaillée mais non verbale (figure 2). La collecte des données est rapide, soit moins d’une minute par sein, tandis que le système expert, qui identifie la présence éventuelle d’une tumeur, n’a besoin que d’une minute pour traiter les résultats. Si une réponse reçue de la poitrine indique la présence possible d’une tumeur, la femme est dirigée vers un professionnel de la santé pour une évaluation et des tests plus approfondis.

Figure 2: A screenshot taken from the user interface, showing the patient position and progress of the data collection.

Figure 2 : Capture d’écran provenant de l’interface utilisateur et montrant la position de la patiente et la progression de la collecte des données.

De bons progrès ont été réalisés à la fois sur les fronts techniques et commerciaux, et une équipe de quatre étudiants au MBA a réussi avec brio lors d’un concours récent où elle a fait une présentation sur l’idée et la conception du système et remporté le prix du public et est arrivée deuxième au classement général. L’analyse de cas envisage la distribution de ce système au Manitoba en 2018 et une expansion dans d’autres provinces canadiennes et en Afrique l’année suivante.

Les commentaires reçus de nos volontaires en Afrique (figure 3) qui ont pris part à notre étude sur la facilité d’utilisation et des participants à un sondage auprès de professionnels des soins de santé étaient positifs, et nous continuons à tester, adapter et améliorer la conception et les algorithmes de classification du système. Fait intéressant, tandis qu’un tiers des participants ont montré un certain niveau d’inquiétude au sujet de l’utilisation des micro-ondes, près de 100 % des volontaires ont estimé qu’ils utiliseraient le système au moins une fois par an, et 90 % des participants ont estimé qu’ils pourraient faire fonctionner le système par eux-mêmes.

Figure 3: First volunteers and staff together with Prof. Pistorius at the National Hospital in Abuja, Nigeria

Figure 3 : Premiers bénévoles et membres du personnel avec le professeur Pistorius à l’Hôpital national d’Abuja, au Nigeria

D’autres essais du système et la communication sur la sécurité et les avantages du système sont requis pour qu’il convienne à une utilisation généralisée. Le processus n’a pas été sans poser quelques difficultés et nous avons réalisé que l’obtention des approbations réglementaires nécessaires sera plus difficile que prévu initialement.

Alors que l’enthousiasme suscité par la mise au point et les essais du dispositif ne peut être sous-estimé, la partie la plus enrichissante de ce projet, à ce jour, a été de vivre la fébrilité et l’implication des volontaires en Afrique. La participation a été exceptionnelle et, avec l’aide de nos partenaires universitaires à Abuja (Nigeria) et à Cape Town (Afrique du Sud), nous avons été en mesure d’obtenir une contribution précieuse à la façon dont le système peut et doit être amélioré. La participation des organisations non gouvernementales a joué un rôle clé en nous permettant d’interagir avec autant de personnes que nous avons pu le faire, et nous avons hâte de revenir dans ces deux régions en 2016 pour évaluer plus a fond le système.

Notre équipe de recherche élargit sa base et a également établi des partenariats de recherche avec l’Université nationale de Galway (Irlande) et l’Université d’Oxford (Royaume-Uni) pour faire avancer ce projet. Le développement de ce dispositif, qui présente des avantages potentiels pour les femmes partout dans le monde, n’aurait pas été possible sans le soutien financier de Grands Défis Canada, CancerCare Manitoba et l’Université du Manitoba. Le dévouement des étudiants et des collaborateurs de l’Université du Manitoba, de l’Université de Cape Town, de l’Hôpital national d’Abuja et du projet Pink Blue – Health and Psychological Trust Centre, au Nigeria, est également appréciée.


Apprenez-en davantage sur ce projet sur la page du site Web de Grands Défis Canada qui lui est consacrée.

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