Ellen Morgan

Le 12 août 2014, le monde célébrait la Journée internationale de la jeunesse. Le thème de cette année était « Jeunesse et santé mentale ». Selon les Nations Unies, 20 % des jeunes (de 15 à 24 ans) dans le monde éprouvent un problème de santé mentale. Avec une population estimée à 1,2 milliard de jeunes, c’est plus de 280 millions de personnes qui sont touchées à travers le monde. Malgré l’ampleur du problème, et peut-être en partie à cause de celle-ci, dans une proportion de 4 sur 5 (80 %), ces jeunes ne reçoivent pas les soins, les traitements ou les services dont ils ont besoin.

Pour faire face à ce fardeau alarmant que représentent les troubles de santé mentale parmi la jeunesse, Grands Défis Canada, (qui est financé par le gouvernement du Canada) a engagé 7,9 millions $CAN pour améliorer les traitements et élargir l’accès aux soins pour les jeunes qui vivent avec des troubles de santé mentale dans les pays à revenu faible ou intermédiaire.

Une communauté mondiale d’innovateurs traduit maintenant ses idées audacieuses en des solutions durables pouvant être déployées à l’échelle, lesquelles montrent déjà des résultats en termes d’amélioration de la santé mentale chez les jeunes. Ces idées audacieuses utilisent des approches novatrices et des systèmes de distribution non traditionnels pour rejoindre les jeunes atteints de maladie mentale : des messages texte visant à sensibiliser la collectivité et à réduire la stigmatisation; des plateformes d’éducation virtuelle pour renforcer les capacités et accroître les connaissances des fournisseurs de soins de santé; et des téléphones mobiles servant de plateformes ou outils de diagnostic portables et accessibles.

Nos innovateurs forment les enseignants à reconnaître les signes de la maladie mentale chez les élèves; ils permettent à des familles d’acquérir des compétences pour soutenir et prendre soin de leurs filles et de leurs fils; et ils donnent aux jeunes des moyens de promouvoir activement leur propre bien-être mental et celui de leurs pairs. Plus important encore, ce type de pensée innovatrice se traduit par des résultats là où cela importe le plus : chez les jeunes souffrant de maladie mentale dans les pays à faibles ressources.

Un bon exemple de ce travail novateur auprès des jeunes est un projet dirigé par Frederick W. Hickling. Dans le blogue ci-dessous, il présente quelques nouvelles et résultats de son projet « Lutter contre la violence chez les jeunes et la violence urbaine avec un programme de thérapie culturelle d’engagement communautaire à Kingston, en Jamaïque ».

Le Dr Frederick W. Hickling est un psychiatre jamaïcain et une sommité dans son domaine dans les Caraïbes. Il a fondé l’Institut de la santé mentale et des toxicomanies des Caraïbes (CARIMENSA) et est actuellement directeur général de la Faculté des sciences médicales de l’Université des Indes occidentales.

Ce modèle psychothérapeutique vise à prévenir que les enfants se développent en devenant des adultes dysfonctionnels. Le système aide à réduire la violence parce qu’il vise à former des adultes en bonne santé qui ont des enfants sains qui grandissent pour devenir des adultes en bonne santé à leur tour, créant ainsi un processus de changement autoalimenté et brisant le cycle du dysfonctionnement et de la violence. L’étude comporte deux volets, les jeunes (Dream-A-World) et les adultes (engagement communautaire). À l’automne 2013, l’Institut de la santé mentale et des toxicomanies (CARIMENSA) de l’Université des Indes occidentales en Jamaïque a reçu une subvention pour son projet « Lutter contre la violence chez les jeunes et la violence urbaine avec un programme de thérapie culturelle d’engagement communautaire à Kingston, en Jamaïque ».

Dream-A-World

Le volet Dream-A-World teste l’efficacité d’une intervention de thérapie culturelle visant à améliorer les compétences sociales et le rendement scolaire des enfants à risque de 8-9 ans dans les collectivités urbaines. Cent étudiants de 3e année ayant obtenu 35 % ou moins lors de leur examen de fin d’année et/ou présentant des comportements perturbateurs, tels qu’évalués par leurs enseignants, ont été mis en comparaison avec les performances d’un groupe témoin similaire pour l’âge et le sexe sur une période de deux ans. L’intervention visait à promouvoir un leadership créatif et visionnaire dans les écoles primaires surpeuplées des quartiers urbains pauvres, et il a transformé des enfants de huit ans perturbés, hargneux et sous-performants en seulement trois semaines.

Le thérapeute culturel de l’une des écoles a affirmé : « …lorsque nous avons commencé, les étudiants étaient très agités, instables et bruyants, mais à mesure que nous travaillions avec eux au cours de la période de trois semaines nous avons observé qu’ils se sont beaucoup calmés. J’ai fait une petite expérience avec eux où j’ai essayé de les chronométrer pour voir combien de temps ils pourraient rester tranquilles. Au départ, j’ai essayé pendant 30 secondes et ça n’a pas duré 17 secondes; à la fin du programme, ils pouvaient se tenir dans la même position pendant environ 3 minutes sans afficher de comportement perturbateur… ». Pendant une période de deux années, les enfants seront évalués pour les changements survenus dans le rendement scolaire et le comportement à l’aide de la mesure de l’adaptation sociale et du comportement scolaire du système Achenbach d’évaluation empirique (Formulaire de rapport d’enseignant / ASEBA FRE). Une évaluation de suivi à la fin de la première année montre déjà une amélioration scolaire et comportementale significative pour tous les enfants de la cohorte, y compris une amélioration marquée de leurs notes scolaires en 4e année et l’excellence dans des activités parascolaires de l’école.

Engagement communautaire

Le volet Dream-A-World

Le volet Dream-A-World

Le volet adulte vise à examiner l’efficacité d’une intervention de thérapie culturelle d’engagement communautaire en vue de réduire la violence au sein d’une collectivité urbaine de la Jamaïque. Avec un taux d’homicides de 53 / 100 000 en 2010, la Jamaïque affiche le troisième taux le plus élevé de violence meurtrière, mais le troisième taux de suicide le plus bas (2,9 pour 100 000) dans le monde. CARIMENSA entend aborder ce paradoxe par l’étude d’un programme de santé publique dirigé par le gouvernement, appelé Community Engagement Mental Health (CEMH) dans deux collectivités de garnison urbaines (Seaview Gardens et August Town). Ces collectivités sont similaires pour la taille et certaines caractéristiques sociodémographiques, notamment un chômage élevé, des revenus faibles ou très faibles, des niveaux élevés de violence interpersonnelle et des taux de criminalité croissants. Le programme CEMH est mis en œuvre par une équipe de professionnels de la santé (psychiatres, infirmières psychiatriques praticiennes et agents de santé mentale) et des aides psychiatriques en milieu communautaire. Utilisant un modèle d’étude de cas avec groupe témoin dans une intervention spécifique de thérapie culturelle (TC) le projet de recherche suivra l’évolution d’indicateurs de la santé mentale mesurables, y compris la violence familiale et interpersonnelle, la création d’emplois et la réduction de la pauvreté, ainsi que le degré d’engagement et de participation communautaire au cours d’une période de 30 mois. À la fin du projet, il est prévu que 100 enfants montreront une amélioration de leur rendement scolaire et des indicateurs de comportement. En outre, on créera un centre de bien-être à Seaview Gardens où 100 membres de cette collectivité seront engagés en permanence dans des activités artistiques et créatives.

La voie vers la durabilité

La durabilité est facilitée par la mise en œuvre des interventions dans des institutions existantes, soit des écoles primaires et un centre de santé communautaire. Les enseignants et les infirmières de ces organisations qui ont participé au projet auront une influence sur leur environnement de travail en intégrant les techniques apprises au cours de l’intervention et en partageant et en enseignant ces techniques à d’autres membres du personnel. En ce qui concerne le déploiement à l’échelle du projet, un objectif majeur est de créer un manuel des processus de thérapie culturelle afin de faciliter la reproduction et l’application de ces modèles non seulement en Jamaïque, mais dans d’autres régions du monde. Le processus de déploiement à l’échelle a déjà débuté avec la collaboration du ministère de l’Éducation de la Jamaïque dans les cinq paroisses ayant les taux d’homicide les taux d’abandon scolaire les plus élevés au pays. Trente-cinq écoles figurant sur la liste du ministère de l’Éducation des écoles primaires ayant les pires performances seront choisies, et CARIMENSA formera et suivra 50 conseillers en orientation actuellement à l’emploi du ministère de l’Éducation sur une période de trois ans.


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