Auteur invité

Ce blogue est aussi publié sur le site du Mental Health Innovation Network. Le blogue original rédigé par Agnes Becker, directrice des communications ciblées à la London School of Hygiene and Tropical Medicine et au Mental Health Innovation Network, se trouve ici : ‘Friendship Bench’ tackles mental health and HIV in Zimbabwe and beyond.


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« C’était si difficile pour moi avant le Banc de l’amitié, j’avais vraiment de la difficulté ».
– Mme Wyeni, utilisatrice du service

« [Grâce au Banc de l’amitié], j’ai appris que je pouvais résoudre mes problèmes avec le soutien de ma famille ».
– Mme Munyaradsi, utilisatrice du service

Assis sous un arbre à côté de la clinique Western Triangle dans la banlieue de Harare, au Zimbabwe, il est difficile d’imaginer que le cercle joyeux de femmes et d’hommes chantant et dansant autour de moi étaient autrefois si désespérés que plusieurs ont tenté de se suicider. Dans le centre du cercle, fait de bois et recouvert de sacs tissés au crochet, de vêtements pour bébés, de verrerie, de cirage et d’épices, se trouve la raison de leur rétablissement : Le banc de l’amitié.

Comment le Banc de l’amitié améliore la santé mentale et le VIH

« L’intégration de la santé mentale dans d’autres programmes, comme ceux ciblant le VIH, peut améliorer ces programmes. »
– Dr David Okello, représentant de l’OMS, Zimbabwe

La recherche a identifié des liens étroits entre la maladie mentale et les maladies chroniques telles que le VIH/sida. Les troubles mentaux courants associés aux concepts Shona de kufungisisa (trop penser), kusuwisisa (tristesse profonde) et moyo unorwadza (cœur douloureux) sont répandues parmi les 15 % de la population adulte au Zimbabwe vivant actuellement avec le VIH/sida. Parce que les gens éprouvant des problèmes de santé mentale sont moins susceptibles d’adhérer au traitement antirétroviral du VIH, il est important pour les pays tels que le Zimbabwe de fournir des soins de santé mentale aux côtés des services axés sur le VIH/sida.

Cependant, le Zimbabwe est confronté à une grave pénurie de spécialistes en santé mentale avec seulement 12 psychiatres pour desservir une population de 15,3 millions d’habitants. Le Banc de l’amitié, un projet en santé mentale dirigé par le Dr Dixon Chibanda du programme de prévention du SIDA au Zimbabwe et soutenu par Grands Défis Canada (qui est financé par le gouvernement du Canada), aborde ce problème par la formation d’agents de santé pour qu’ils puissent conseiller les personnes atteintes de troubles mentaux courants dans les cliniques de soins primaires.

« Avant le Banc de l’amitié, mon conseil était de dire « fait ceci et fait cela ». Maintenant, j’appris que n’est pas la façon. Je dois leur demander … d’ouvrir leur esprit. De résoudre leurs propres problèmes. D’apprendre cela pour eux-mêmes. Je vois comment ça les aide. Je pense que ce banc ne devrait pas se développer partout au Zimbabwe. Il devrait se répandre partout dans le monde. »
– Shekede, travailleuse de la santé ou «grand-mère»

Les bancs sont placés à l’extérieur des cliniques où les gens viennent recevoir des services pour une variété de conditions de santé, y compris le VIH/sida. Les travailleuses de la santé, connues sous le nom de dames en or ou « grand-mère », sont formés pour offrir une thérapie de résolution de problèmes aux personnes qui sont orientées vers les bancs de l’amitié par les cliniciens. Ils reçoivent jusqu’à six séances de consultation avec les grands-mères du banc de l’amitié, y compris une visite à domicile et, dans certains cas, l’accès à d’autres services sanitaires ou sociaux, ou à des activités génératrices de revenus. Les sacs à main et les vêtements pour bébés, et le poli et la verrerie qui se trouvent sur le banc sont vendus par les utilisateurs des services du Banc de l’amitié pour produire des revenus qui leur fournissent des ressources vitales pour se sortir de la pauvreté.

J’avais lu sur le projet avant, mais ce n’est qu’après m’être assise sous l’arbre, écouté témoignage après témoignage, que j’ai réalisé quel impact peut avoir une telle intervention simple :

Il y a cette femme devenue dépressive parce qu’elle devait cacher à son mari l’enfant auquel elle avait donné naissance après avoir été violée par un ami de son père. Elle a parlé de la façon dont les conseils des grands-mères du Banc de l’amitié l’ont aidée à révéler la situation à son mari et, avec son soutien, à confronter et pardonner à l’homme qui l’avait violée.

Un homme a parlé de la façon dont sa dépression et sa haine pour les femmes se sont exacerbées hors de contrôle après qu’il ait contracté le VIH de sa femme, qui ne lui avait pas révélé sa condition séropositive. Le Banc de l’amitié l’a aidé à soigner sa dépression et sa haine, et il est maintenant capable d’avoir à nouveau de bons rapports avec les femmes.

Une autre femme était devenue si déprimée qu’elle a songé à tuer ses enfants. Elle a essayé de se suicider en avalant 7 contenants de poison et son estomac est maintenant perforé de façon permanente en raison des dommages subis. Grâce au Banc de l’amitié, elle est maintenant de retour au travail à vendre des épices; elle est également enceinte de son deuxième enfant.

Ces histoires me faisaient penser à des amis au pays qui sont aussi aux prises avec la dépression, certains à la suite d’une agression sexuelle. La santé mentale est quelque chose qui nous touche tous.

Travailler ensemble pour la durabilité

Une étude pilote menée en 2006 a montré une amélioration cliniquement significative des symptômes de troubles mentaux courants parmi les bénéficiaires de l’innovation du Banc de l’amitié dans trois cliniques de Mbare, à Harare. Un essai contrôlé randomisé récemment complété fournit une preuve supplémentaire de cet impact – les résultats doivent être publiés en 2016. Le projet envisage maintenant la façon d’assurer la durabilité de cette innovation.

Je rendais visite au Banc de l’amitié dans le cadre d’une mission de soutien dans les pays du Mental Health Innovation Network, en partenariat avec l’Overseas Development Institute (ODI). La raison de notre visite? Encourager la participation des intervenants au projet et animer un atelier, financé par Grands Défis Canada, avec l’équipe du Banc de l’amitié et ses partenaires sur la préparation au déploiement à l’échelle et la durabilité. Au cours de l’atelier, nous avons utilisé la trousse pour influencer les politiques de santé mentale dans le monde de l’ODI-ROMA, la trousse de communication en santé mentale dans le monde du MHIN, et des études de cas de déploiement à l’échelle dans d’autres contextes.

L’enthousiasme manifesté lors de l’atelier était contagieux – nous sommes même arrivés avec des présentations de 2 minute à l’intention des principaux intervenants :

La santé mentale au Zimbabwe : quelle est la prochaine étape?

Le dernier jour de l’atelier a permis de réunir le Banc de l’amitié, Médecins Sans Frontières, le département de la Santé de la ville d’Harare, le ministère de la Santé, les directeurs médicaux des provinces du Zimbabwe et le bureau national de l’OMS. Avoir un tel groupe d’intervenants influents présents dans la salle pour parler de la santé mentale était une première au Zimbabwe. Le groupe a identifié six domaines prioritaires où tous les partenaires pourraient contribuer à améliorer les services de santé mentale au Zimbabwe:

  1. Prise de conscience et sensibilisation des fonctionnaires responsables des politiques et de la planification en matière de santé, des fournisseurs de services, et de la population.
  2. Intégration de la santé mentale dans d’autres secteurs de la santé, tels que les services axés sur le VIH.
  3. Soutien et supervision de bonne qualité des prestataires de services.
  4. Déploiement à l’échelle graduel des services de santé, tels que le Banc de l’amitié.
  5. La collaboration entre les gouvernements, les entreprises, les ONG et les fournisseurs de services.
  6. Assurer la viabilité des services de santé mentale tels que le Banc de l’amitié.

«J’ai été convaincu que ce banc donne de bons résultats. Nous n’avons rien de moins cher. Nous n’avons pas de psychiatres à Harare. Ce banc comble cette lacune … de façon modique. C’est un moyen efficace… Il doit être reproduit dans d’autres villes et provinces de la région ».
– Dr Prosper Chonzi, directeur de la santé, département de la Santé de la ville d’Harare, au Zimbabwe

Mon voyage au Zimbabwe a été révélateur. Voir la réalité d’un projet sur le terrain – comment un concept aussi simple peut aider les gens à retrouver l’espoir – a été émouvant. Le succès du Banc de l’amitié rassemble les partenaires dans une réflexion sur la manière de l’étendre à d’autres domaines, à Harare et ailleurs.


Pour en savoir plus sur le projet du Banc de l’amitié, visitez la page du projet sur le site Web du Mental Health Innovation Network.

Nous vous invitons à afficher vos questions et vos commentaires au sujet de ce billet de blogue sur la page Facebook de Grands Défis Canada et sur Twitter @gchallenges.